Les origines
Des ossements découverts sur le
territoire algérien témoignent d’une présence humaine remontant à plus de
500 000 ans. Des civilisations ibéromaurusiennes (10 000 ans
av. J.-C.) et capsiennes (5 000 ans av. J.-C.) se développèrent
respectivement dans le Nord (région de Constantine) et dans l’Est et le
Sahara. On ne connaît pas l’origine exacte des Berbères, mais ils sont sans
doute les descendants de ces premiers habitants et des hommes que décrivent les
gravures rupestres sahariennes du Tassili des Ajjer (3 000 ans av. J.-C.).
Chasseurs puis pasteurs et cultivateurs, les Berbères s’organisèrent en
tribus et en confédérations, que les Grecs distinguaient sous les noms de
libyques, numides et maures.
De Carthage à Rome
Aux alentours de 814 av. J.-C.,
les Phéniciens, navigateurs venus de l’Est méditerranéen, fondèrent la
ville de Carthage, dans l’actuelle Tunisie. Son rayonnement commercial ne fut
effectif qu’après la décadence de Tyr (550 av. J.-C.), leur
principale cité. Les Carthaginois établirent des comptoirs sur la côte algérienne
(Annaba, Skikda, Alger, etc.). Ils exerçaient une domination économique et
politique sur les populations libyco-berbères.
En revanche, les chefs numides
savaient mieux jouer des rivalités que la cité développait avec Rome. Ainsi,
durant les guerres puniques (IIIe-IIe siècles av. J.-C.), Masinissa,
un chef numide allié à Rome, s’empara de Cirta (Constantine). Cette capitale
des rois berbères de Masaesyles, dont le territoire s’étendait jusqu’au
Maroc oriental, devint alors celle de la Numidie. Après un long règne (203-148 av. J.-C.),
Masinissa mourut, laissant le royaume en partage à ses fils, qui composèrent
avec les Romains. Mais le petit-fils de Masinissa, Jugurtha, refusa la mainmise
romaine; instigateur d’une insurrection en 111 av. J.-C., il devait
être soumis par Rome en 105 av. J.-C.
Sous l’autorité romaine, la
Numidie devint avec l’Égypte le "grenier de Rome", fournissant blé
et huile d’olive. La Maurétanie, annexée à l’Empire romain en 40 apr. J.-C.,
fut divisée en deux provinces impériales (Maurétanie Tingitane et Maurétanie
Césarienne), tandis que l’est de l’Algérie était rattaché à la province
proconsulaire d’Afrique. Pour protéger la région des raids des tribus
nomades, un réseau de voies militaires fut construit, reliant entre elles des
villes de garnison, environ cinq cents cités de 5 000 à 10 000 habitants,
qui furent dotées de tous les attributs des villes romaines (Timgad, Lambèse).
Au IVe siècle apr. J.-C.,
alors que les légions romaines appelées à défendre l’Empire en déclin, se
retirèrent de Numidie, la région fut, pour un temps, déclarée indépendante,
sous la pression du mouvement donatiste. La population berbère latinisée, tôt
convertie à la foi chrétienne, s’était en effet massivement ralliée à
cette secte chrétienne, persécutée par les autorités romaines, après que le
christianisme fut devenu religion officielle de l’Empire (313), tandis que les
tribus berbères des montagnes, non latinisées, continuaient à résister. Dans
un contexte d’anarchie, les Vandales, peuple germanique, envahirent l’Afrique
du Nord et y établirent un royaume en 429. Leur domination, limitée à la
bande côtière, resta cependant fragile, et des principautés berbères indépendantes
purent se reconstituer durant cette période.
En 533, les Vandales furent chassés
par les armées de l’empereur byzantin, Justinien Ier, dont le rêve était
de faire renaître la splendeur de l’Empire romain. La conquête byzantine,
pourtant, se limita seulement à l’est du pays.
Les dynasties musulmanes du Moyen Age
Le rêve de Justinien Ier
s’effondra lorsque, en 647, les Arabes, porteurs d’une nouvelle religion,
l’islam, se lancèrent à la conquête de l’Afrique du Nord. À l’est,
dans les Aurès, ils durent s’opposer à la résistance de deux chefs berbères,
Kusayla et la Kahina, une prophétesse. Mais, dès le début du VIIIe siècle,
les Berbères se soumirent et se convertirent massivement à l’islam. Des
chefs de guerre, tel Musa ibn Nusayr, s’illustrèrent même dans les troupes
qui combattaient pour l’expansion de l’islam. Dès le début du VIIIe siècle,
l’Algérie, comme l’ensemble du Maghreb, était devenue une province placée
sous l’autorité des Omeyades. Les Arabes y constituaient une élite urbaine.
Après 740, tandis que se
multipliaient les querelles de succession pour le califat, les Berbères se
dressèrent contre l’autorité califale et, comme beaucoup de ceux qui, dans
la communauté musulmane, luttaient contre la domination arabe, ils rallièrent
les kharijites, dissidents fondamentalistes et démocrates de l’islam. Une
communauté kharijite subsiste d’ailleurs aujourd’hui dans le Mzab (ibadites).
Les Berbères kharijites fondèrent plusieurs petits royaumes. L’un des plus
importants, celui des Rostémides, créé en 777 à Tahert (Tiaret), fut balayé
en 911 par la dynastie arabe chiite des Fatimides, soutenue par les Kabyles, une
confédération berbère de l’Est. Dès le XIe siècle, l’arabe devint
la langue majoritaire dans les plaines et les steppes. Seuls les Berbères des
montagnes résistaient durablement. Deux dynasties berbères devaient cependant
régner sur toute la région entre le XIe et le XIIIe siècle : les
Almoravides et les Almohades. Venues du Sud marocain, elles étendirent leur
influence du Nord-Ouest africain au sud de l’Espagne. Tlemcen, la capitale des
Almohades, devint un centre artisanal réputé. On y construisit de belles mosquées
et de nombreuses écoles coraniques. Les ports maritimes (Béjaïa, Annaba et
Alger, en pleine expansion) développèrent un commerce actif, apportant en
Europe les fameux chevaux barbes, de la cire, un cuir de qualité et des tissus.
L’autorité ottomane
L’anéantissement des Almohades,
en 1269, déclencha une rude bataille commerciale entre chrétiens et musulmans
pour le contrôle des ports de la Méditerranée. La région fut partagée entre
trois dynasties berbères : les Mérinides à Fès, les Abdelwadides à
Tlemcen et les Hafsides à Tunis. Dès la fin du XVe siècle, après la
reconquête chrétienne (la Reconquista) de la totalité de l’Andalousie, l’Espagne
occupa plusieurs ports de la côte algérienne (Mers el-Kébir, Oran, Béjaïa).
Les Abdelwadides acceptèrent le protectorat espagnol, mais les autorités
religieuses des villes portuaires, soutenues par la population, engagèrent des
corsaires, qui capturaient les navires marchands et retenaient l’équipage et
la cargaison en échange d’une rançon. En 1518, Alger et plusieurs autres
ports furent assiégés par les Espagnols; les Turcs ottomans furent appelés à
la rescousse.
Les Barberousse, deux frères
corsaires, d’origine grecque ou sicilienne — selon les sources —
et convertis à l’islam, obtinrent du sultan Soliman le Magnifique d’être
envoyés en Afrique du Nord avec une flotte. Ils chassèrent les Espagnols de la
plupart de leurs nouvelles possessions, résistèrent au siège de Charles Quint
devant Alger (1541). Les Abdelwadides furent déposés en 1554, et Khayr al-Din,
le plus jeune des Barberousse, fut nommé beylerbey, c’est-à-dire représentant
du sultan en Algérie. Proconsuls militaires d’Afrique, ces "rois d’Alger"
exercèrent leur autorité non seulement sur la zone littorale, mais sur les
pachas de Tunisie et de Tripolitaine. En raison de son éloignement de
Constantinople, la régence d’Alger fut gouvernée comme une province
autonome.
Conséquence indirecte de la
Reconquista espagnole, l’établissement des Ottomans en Algérie déboucha sur
la mise en place d’une monarchie élective et des formes de gouvernement qui
marquèrent profondément l’Algérie : au XVIIe siècle, Alger
choisissait son dey qui recevait ensuite l’investiture de Constantinople.
L’ordre était en principe assuré par deux forces militaires rivales, l’odjaq,
la milice des janissaires, et la taïfa des raïs, la corporation des corsaires.
Mais l’arrière-pays, le Sud, le Constantinois, la Kabylie, échappait au
pouvoir de la régence d’Alger, qui fut essentiellement une "colonie
d’exploitation". Le pouvoir ottoman eut recours à la formation de smalas
(colonies militaires) et aux maghzens, des tribus privilégiées qui faisaient
rentrer l’impôt.
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